Un avion maudit ? Accueilli en 2015 comme une révolution dans le monde de l’aéronautique, le Boeing 737 Max, créé pour concurrencer l’Airbus A320, enchaîne les déconvenues depuis sa mise en service en 2017. Vendredi 5 janvier, un avion d’Alaska Airlines à destination d’Ontario, en Californie, a été contraint d’atterrir en urgence à l’aéroport international de Portland d’où il avait décollé quelques minutes plus tôt. La raison ? Une section de son fuselage s’est soudainement détachée. Sur les réseaux sociaux, les passagers du vol ont partagé des photos montrant un trou béant sur le côté de l’appareil, derrière l’aile gauche. Par miracle, aucun passager n’a été blessé. Le Bureau national de la sécurité des transports (FAA) et Alaska Airlines ont annoncé enquêter sur l’incident.

Pourtant, le 737-9 était presque neuf : fabriqué en 2023 et certifié en novembre, a indiqué le FAA. Dans un communiqué publié vendredi, le président de la compagnie a annoncé immobiliser «temporairement» les 65 appareils de sa flotte de Boeing 737-9.

Tout comme United, qui possède la flotte de 737-9 la plus importante au monde : 46 appareils sont en attente d’inspection, 33 ayant déjà été examinés. Son concurrent Aeromexico a, lui, décidé de clouer au sol tous ses 737 MAX 9 jusqu’à ce que les vérifications aient été effectuées, et la compagnie panaméenne Copa Airlines a suspendu l’exploitation de 21 appareils. Dimanche, la compagnie turque Turkish Airlines a annoncé maintenir au sol les cinq Boeing 737 MAX 9 de sa flotte.

Aux États-Unis, l’Agence fédérale américaine de l’aviation civile (FAA) a ordonné samedi l’inspection immédiate de 171 appareils 737 MAX 9 de Boeing, maintenus au sol après l’incident. La directive de la FAA «impose aux compagnies aériennes d’inspecter l’appareil avant un nouveau vol», a indiqué l’agence.

Il y a six ans, le 28 octobre 2018, 189 personnes sont mortes dans le crash, au large de l’Indonésie, d’un Boeing 737 Max de la compagnie Lion Air, peu de temps après son décollage de Jakarta. Un mois après l’accident, les enquêteurs indonésiens attribuaient cet accident à un défaut de conception, une formation inadaptée des pilotes et des performances médiocres de l’équipage.

Le MCAS, le système automatique qui devait empêcher l’avion de piquer, a été pointé du doigt. «La conception et la certification du MCAS étaient inadaptées», déclarait alors le comité national en charge de la sécurité des transports. De même, un capteur de ce système avait été «mal calibré». Un défaut non décelé par les équipes de maintenance.

Moins de cinq mois plus tard, le 10 mars 2019, c’est un 737-800 MAX d’Ethiopian Airlines qui s’est écrasé quelques minutes après son décollage. Les 149 passagers, dont neuf Français, et les huit membres d’équipage sont morts. L’avion reliait Addis-Abeba à Nairobi, au Kenya. Le rapport d’enquête préliminaire mettait en cause le système antidécrochage du Boeing, pourtant activé.

Dans les jours qui suivent, les 737 MAX sont interdits des espaces aériens chinois, européens, indiens, canadiens et américains. Mais aussi interdits de survoler la Tunisie, l’Égypte, l’Argentine, le Japon, la Malaisie, la Turquie, l’Australie ou encore les Émirats arabes unis. De nombreuses compagnies avaient de même immobilisé leurs avions, comme Ethiopian Airlines, Norwegian Air Shuttle ou Turkish Airlines.

En janvier 2020, Boeing suspendait la production de son appareil. Après deux ans passés cloué au sol, le 737 MAX était à nouveau autorisé à survoler le ciel européen au début de l’année 2020 ; tout comme aux États-Unis, au Brésil et au Canada.

La FAA n’avait autorisé la remise en service qu’après des changements dans le système de contrôle en vol.

En décembre 2023, le constructeur a informé les compagnies aériennes que les appareils devaient être inspectés pour vérifier des pièces desserrées dans le système de contrôle du gouvernail, à la suite de la découverte par un opérateur international d’un boulon sans écrou lors d’une inspection de routine. L’avionneur a ensuite repéré sur un avion non encore livré un écrou « qui n’était pas correctement serré ».

Plus récemment, Boeing a dû ralentir ses livraisons à cause de problèmes sur le fuselage, en particulier sur la cloison étanche arrière de l’appareil. À fin décembre, Boeing a livré au total plus de 1370 exemplaires du 737 MAX et son carnet de commandes en contient actuellement plus de 4000. Suspendues par la Chine depuis les crashes, les livraisons aux compagnies chinoises n’ont toujours pas repris.