Heureux aux Jeux, malheureux à l’Euro. Tel pourrait être le dicton résumant l’histoire des championnats d’Europe ayant précédé de quelques mois des Jeux Olympiques pour l’équipe de France. Ainsi, traditionnellement, les handballeurs français brillent peu dans le tournoi continental organisé en début d’année olympique. La palme du pire revenant à l’édition 2020, achevée sur une piteuse élimination au 1er tour et une 14e place finale. Et qu’importe que les Jeux de Tokyo aient finalement eu lieu en 2021, le symbole demeure puisqu’au moment de l’Euro, le spectre de la crise sanitaire, et donc d’un report, n’existait pas encore. Mais la bande de Nedim Remili espère rompre avec cette mauvaise habitude cette année en Allemagne (10 au 28 janvier).

A sept mois des JO de Paris 2024, il serait temps, en effet, pour les Bleus de renouer avec un titre européen qui les fuit depuis plus de dix ans. Pour le dernier Euro de leur star Nikola Karabatic avant sa retraite à l’issue de la saison, aussi, il n’y aura pas d’autre opportunité. En matière de handball, écrire qu’une compétition ne réussit pas aux Bleus reste cependant relatif mais «l’équipe de France n’a obtenu que deux médailles, de bronze, l’année des Jeux, c’est assez ridicule», observe le sélectionneur Guillaume Gille. «Au regard de notre palmarès, que l’on n’ait jamais eu l’occasion de briller l’année des Jeux, c’est assez paradoxal», poursuit-il. «Surtout quand on voit les résultats lors des quatre derniers JO, à savoir trois victoires (2008, 2012 et 2021) et une finale (2016).»

Leurs homologues handballeuses leur ont montré la voie en décrochant une troisième couronne mondiale le mois dernier. «C’est une motivation, reconnaît le capitaine Luka Karabatic. Les voir victorieuses, ça donne clairement envie de suivre leurs traces.» Et pour une fois, les Bleus pourront compter sur tout le monde sur le pont, exception faite du gardien Vincent Gérard insuffisamment remis. Oublié du coup le cauchemar du dernier Euro, deux ans plus tôt, quand Guillaume Gille avait dû faire une croix sur quelques-uns de ses tauliers, blessés, comme Luka Karabatic, Nedim Remili, Timothey N’Guessan ou encore Elohim Prandi. Sans compter une cascade de cas positifs de Covid-19.

Sans reproduire la série noire, la longue liste d’absents au dernier Mondial (Timothey N’Guessan, Karl Konan, Hugo Descat, notamment) conjuguée aux blessures en cours de tournoi avait abouti à une finale, perdue face au Danemark, disputée sans arrière gauche, si ce n’est Nikola Karabatic, sur une jambe en raison d’une blessure à un pied. «Dans cette période, on se retrouve très souvent confronté à des blessures ou des joueurs en méforme et contraints de jeter l’éponge à quelques jours de l’Euro», résume le sélectionneur. «Là, ce n’est pas le cas.»

Même au complet, parmi les dix-neuf, ils ne sont plus que trois des champions d’Europe de 2014 présents en Allemagne, les frères Karabatic, ainsi que Valentin Porte. Signe qu’il serait temps d’un nouveau couronnement, en plus dans le berceau du handball moderne. Sport dont les règles ont été mises au point par un professeur d’éducation physique berlinois, Karl Schelenz. «Je me réjouis des salles allemandes», salive Guillaume Gille, qui a évolué une décennie à Hambourg. «On va rencontrer des gens connaissant très bien le hand, des gens qui vivent au quotidien derrière leur club de Bundesliga.»

Après le match d’ouverture à Düsseldorf prévu à 18h00 ce mercredi face à la Macédoine du Nord, promettant de battre un record d’affluence pour une rencontre de hand – plus de 50.000 spectateurs sont attendus -, les Bleus doivent se déplacer dans la capitale berlinoise où ils défieront la Suisse dimanche (18h), puis leurs hôtes allemands mardi (20h30) pour l’ultime choc de leur groupe A. Viendra alors, sauf catastrophe, le temps d’une deuxième phase de groupes, celle du tour principal à Cologne. Une phase qu’il vaudrait mieux aborder avec deux points au compteur plutôt que zéro alors qu’ils devraient croiser la route de l’Espagne et, à un degré moindre de difficulté, de la Croatie et de l’Islande.

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Qualifiés aux JO en tant que pays-hôte, comme les Danois en qualité de champions du monde, les Bleus n’ont pas l’obligation de l’emporter sous peine de devoir disputer un incertain tournoi de qualification olympique en mars, à la différence des Espagnols, qu’ils pourraient croiser au tour principal. Ou des Suédois et Norvégiens, valeurs sûres versées dans l’autre partie de tableau, qu’ils ne peuvent donc affronter avant le week-end final (26-28 janvier). S’agira-t-il d’une absence de motivation néfaste, ou au contraire d’une pression en moins bénéfique pour évoluer de manière plus libérée ? Impossible à prévoir. Ce qui est certain, c’est que sur le papier, la France dispose de tous les atouts nécessaires pour décrocher un quatrième titre continental et se rapproche ainsi des cinq couronnes suédoises. Et à six mois de Paris 2024, s’imposer en Allemagne enverrait un message fort à la concurrence.