«Avec 28 commerces pour 1000 habitants, Paris jouit de l’une des densités commerciales les plus importantes au monde», se félicite la mairie de Paris, qui vient de publier une étude sur l’évolution des commerces parisiens entre 2020 et 2023. Réalisée par la Ville de Paris, la Chambre de commerce et d’industrie de Paris (CCI) et l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur), elle a permis de recenser pas moins de 60.846 commerces, bars et restaurants ou services commerciaux sur les quelque 83.154 locaux en rez-de-chaussée présents dans les rues de la capitale. Soit «une baisse limitée à -1,4%» sur ces trois dernières années, et ce, «malgré la crise sanitaire», constate la Ville. Une relative stabilité qui cache tout même quelques changements clés dans la typologie des commerces parisiens.

Parmi eux, l’étude pointe l’apparition de 863 commerces dits «émergents», installés à Paris entre 2020 et 2023. «Reflet des nouvelles aspirations et des évolutions de la société, cette catégorie concerne des activités initialement peu présentes ou nouvelles», précise le rapport. Dans celui-ci, l’on observe notamment une forte hausse du commerce alimentaire. Une hausse de 4% (soit 310 nouveaux commerces ouverts), qui traduit «la volonté des Parisiens d’avoir accès à des commerces de proximité» lorsqu’«a contrario, la montée du commerce en ligne a notamment eu des conséquences sur les commerces d’équipement de la personne (prêt-à-porter, chaussures, bijouterie…) avec une baisse de 8%». Soit la disparition de 621 commerces de ce type sur les 7300 existants.

Et le moins que l’on puisse dire est que les chiffres sont criants : entre 2020 et 2023, le nombre de pâtisseries, d’hypermarchés et de supermarchés spécialisés a respectivement augmenté de 22%, 33% et 44%, quand le nombre de tailleurs sur mesure, de magasins de puériculture et de prêt-à-porter femme a en parallèle chuté de 22%, 20% et 15%. Autres faits notables : le nombre de points de vente de CBD a littéralement explosé ( 405%), en passant de 22 boutiques en 2020 à 89 en 2023, de même que le nombre d’ongleries et autres bars à sourire, en hausse de 20% et 100%. Le marché de la seconde main tire également son épingle du jeu, avec 39% de réparateurs de vélos et 28% de friperies en plus.

Est-ce à dire que le visage de Paris, capitale de la mode, va profondément se modifier ? «Non», répond d’emblée Nicolas Bonnet-Ouladj, l’adjoint à la mairie de Paris chargé du commerce et de l’artisanat, qui assure, à la veille de l’ouverture de la Fashion Week à Paris, que «la vitalité commerciale des grandes maisons de prêt-à-porter se porte très bien». «Le problème, ce sont plutôt les grandes chaînes telles que C

Mêmes inquiétudes concernant les fast-foods, en hausse de 10% entre 2020 et 2023, qui «génèrent beaucoup de déchets». De même concernant les points de vente de CBD, qui «ne sont pas encadrés par la loi au même titre que les bars-tabac», déplore l’élu, et «peuvent par exemple s’installer tout près d’une école». «Nous, on revendique le fait de légiférer un peu sur le CBD, pour assurer des contrôles sur les ventes et éviter que cela devienne des coffee-shops», poursuit-il, évoquant le «flou juridique» qui entoure l’émergence de ces nouveaux commerces. Même chose pour les ongleries, ces petites échoppes qui proposent des poses de vernis pieds et mains à la chaîne, passés de 470 en 2020 à 565 en 2023.

Une augmentation notable qui n’a pas échappé à Nicolas Bonnet-Ouladj, davantage enclin à défendre les petits artisans et le «Fabriqué à Paris» que les manucures. L’élu communiste évoque même «une nouvelle tendance» qu’il va falloir «suivre de près», afin d’éviter notamment que certaines rues soient condamnées à «la mono-activité» et la présence exclusive de ces échoppes. D’autant qu’elles sont loin, comme il le souligne, d’être particulièrement vertueuses en matière environnementale, en raison des «solvants nocifs» qu’elles utilisent dans le cadre de leur activité principale. Alors que la Ville de Paris est «en pleine révision de son plan local d’urbanisme (PLU)», l’adjoint précise être prêt à «protéger le linéaire commercial de certains quartiers» et à «préempter» lorsque cela est nécessaire, justement pour empêcher que ceux-ci n’accueillent plus qu’exclusivement ces commerces «émergents».

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Pour autant, il se réjouit d’une «tendance plutôt positive» autour des commerces de bouche : «Le nombre de pâtisseries, traiteurs, cavistes, fromagers… continue à augmenter et on observe de plus en plus de rues qui proposent de véritables parcours clients.» «Toutes les études montrent que la diversité renforce le dynamisme commercial», assure l’élu, qui assure que la Ville compte se battre, «comme elle l’a fait sur les “dark kitchens” et les “dark stores ”», pour défendre ces commerces. Au total, 310 nouveaux commerces alimentaires ont vu le jour dans la capitale entre 2020 et 2023, traduisant selon l’étude «la volonté des Parisiens d’avoir accès à des commerces de proximité pour réaliser leurs achats du quotidien».

«Les nouvelles implantations commerciales avec 863 commerces “émergents” et un accroissement global du nombre de poissonneries, boulangeries, primeurs, cavistes… montrent la vitalité, l’audace et l’énergie des commerçants parisiens», se félicite à ce sujet la présidente de la CCI de Paris, Soumia Malinbaum, qui appelle à «encourager et soutenir» le dynamisme des commerçants. Comment ? En les accompagnant sur des questions «d’efficacité énergique, d’accessibilité et de transition numérique» mais aussi «d’intégration du design, dans les boutiques et les vitrines autant que dans les produits». En outre, Nicolas Bonnet-Ouladj invite les Parisiens à changer leur mode de consommation. Pour les aider, il souhaite lancer «une campagne de communication auprès des clients» ainsi qu’«une application avec l’office de tourisme Paris je t’aime», sur laquelle seront listés les commerces labellisés «Fabriqué à Paris».