Il entend défier Emmanuel Macron sur le terrain de l’immigration. C’est le sens de l’appel lancé par Bernard Carayon dimanche à l’ensemble des maires de France. Les dernières déclarations présidentielles, pas plus que les premiers pas du nouveau gouvernement de Gabriel Attal ne pourront interrompre le combat national du maire LR de Lavaur (Tarn), lancé contre une politique migratoire de répartition qu’il juge «irresponsable», voire «dangereuse .

Dans cet appel, diffusé sur le blog personnel de Bernard Carayon, les réseaux sociaux et le site internet des Républicains, l’élu local commence par cibler la responsabilité du chef de l’État dans une stratégie qu’il croit en lien avec les Jeux Olympiques. «Le président de la République a décidé de disperser dans les territoires ruraux des dizaines de milliers d’immigrés, séjournant jusqu’à présent, irrégulièrement ou non, dans la région parisienne. Pour rendre, sans doute, Paris plus ”présentable” et plus contrôlable, six mois avant les Jeux Olympiques… C’est inacceptable», fustige le président de la fédération LR du Tarn.

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Carayon a déjà gagné une bataille contre l’État en terre cathare. C’était en 2023 à Réalmont, là où le préfet avait envisagé la création d’un Centre d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada) envisagé pour une cinquantaine de migrants, avant de devoir reculer face à l’hostilité locale. L’élu de droite salue alors l’arrêt de ce projet comme une victoire. «L’accord des maires est désormais requis… Chacun comprendra qu’aucune demande d’installation à Lavaur, exprimée par le représentant du gouvernement, ne sera acceptée», prévient-il dans un communiqué, avant d’adresser un courrier à tous les maires de son département intitulé : «Non à l’installation dans le Tarn de migrants supplémentaires».

Dans cette lettre, plusieurs sujets sont dans le collimateur : la remise à neuf de logements vacants, le statut de «réfugiés présumés» avant examen de leur situation, la faiblesse du nombre d’expulsions pour les déboutés de ce même statut, le lien entre «immigration de masse», «délinquance» et «criminalité», les «75%» de Français opposés à cette immigration, sans oublier quelques questions sur les conséquences en cas de refus municipal. «Serons-nous pénalisés financièrement par l’État si nous n’accompagnons pas cette politique ?», interroge l’ex-parlementaire, avec inquiétude. Il met également en garde les maires face à ce qu’il perçoit comme un risque politique : «Si dans votre commune, s’observe une montée des actes de délinquance ou des réactions, hélas, épidermiques de rejet des migrants, c’est vous et non l’État que vos concitoyens rendront responsables de cette situation».

Certains opposants lui reprocheront de ne pas vouloir jouer la carte de la solidarité dans un moment critique, quand cette réalité des flux migratoire s’impose comme une urgence face à laquelle nombre de dirigeants européens semblent dépassés. «L’État, qui se défie de ces sujets, est très mal placé pour imposer une telle répartition, réplique Carayon, Emmanuel Macron ne sait pas comment s’y prendre et sa majorité ne lui permet pas de traiter le sujet. Il est à la fois schizophrène et pervers quand il s’empresse de saisir le Conseil constitutionnel sur le dernier texte immigration après avoir invité ses parlementaires à le voter».

Plus récemment, le 15 décembre dernier, le conseiller régional d’Occitanie a adressé 11 questions très directes au nouveau préfet du Tarn, Michel Vilbois. Il interroge le représentant de l’État sur plusieurs sujets dont, par exemple, le nombre total d’immigrés attendus dans le département dans le cadre de la politique nationale de ventilation, le poids financier des logements et des allocations prévus, le nombre de fichés S ou encore les projets de «salles de prières salafistes» … Autant d’éclairages auxquels, soutient-il, « tout citoyen français a droit, a fortiori les élus de la République ».

Dans une nouvelle lettre expédiée le 8 janvier, Bernard Carayon remonte au créneau auprès du même préfet pour s’étonner de ne toujours pas avoir de réponse. Des réponses qui, selon nos informations, n’étaient toujours pas arrivées à Lavaur dimanche.

«Ce n’est pas ”essentialiser” les étrangers que de dire la vérité des chiffres. Mais c’est en la niant que l’on entretient la colère populaire, voire une insupportable xénophobie», insiste l’élu tarnais. Au passage, il rappelle à l’exécutif public local que le chef de l’État établit lui-même un lien entre immigration et délinquance. Au nom du principe «constitutionnel de précaution», il invite également l’autorité publique à anticiper davantage les «risques judiciaires générés par ses incuries», à l’image des projets de plaintes envisagés récemment par certaines victimes des inondations dans le Pas-de-Calais. «Les territoires ruraux n’ont pas envie de vivre la vie des cités. Quand on choisit le Tarn, l’Aveyron ou le Cantal, ce n’est pas forcément pour des raisons historiques ou familiales, mais aussi par envie de vivre quelque chose de très différent des banlieues», martèle Bernard Carayon auprès du Figaro.