Largement adopté au Sénat, le texte se veut un hommage aux deux jeunes filles assassinées par un terroriste dans la gare de Marseille en 2017. En défendant son projet dans l’hémicycle, dans la nuit de mardi à mercredi, Philippe Tabarot, sénateur des Alpes-Maritimes, n’a pas manqué de rappeler à la mémoire des parlementaires de la Chambre haute cet événement tragique. «Le 1er octobre 2017, sur le parvis de la Gare Saint Charles, Maurane 20 ans, étudiante en médecine et Laura, 21 ans élève infirmière, se voyaient ôter la vie par une terrible attaque islamiste à coups de couteau. Ce drame de Marseille a sans doute été pour moi, élu régional aux transports à l’époque, celui de la prise de conscience qui m’amène aujourd’hui avec cette proposition de loi à cette tribune», a exposé le parlementaire dans son introduction, avant de constater une démultiplication de drames similaires survenus depuis la tragédie marseillaise : Bayonne, Gare de Lyon, station Stalingrad, Nice, etc.
Compte tenu du large soutien obtenu au Sénat (227 voix pour), notamment par les Centristes, Philippe Tabarot est confiant sur l’adoption finale du texte à l’Assemblée, alors que Matignon a accepté une procédure accélérée obligeant les députés à en débattre au cours des six prochaines semaines. L’objectif, qui semble partagé par beaucoup, est de pouvoir compter sur une loi au début du printemps et avant les Jeux Olympiques de l’été.
Quelle serait l’efficacité d’une telle loi si elle était adoptée, notamment contre les attaques au couteau dans les transports ? Pour Philippe Tabarot, qui revendique un texte bâti à partir des réalités quotidiennes vécues sur le terrain, les avancées seraient loin d’être négligeables en termes de prévention et de sécurité. «C’est une victoire pour la sécurité dans les transports, se félicite l’élu auprès du Figaro. Je m’étais rendu compte de l’ampleur du danger et des difficultés de nos forces de sécurité sur le terrain. Il fallait réagir et agir avec un texte non seulement issu du terrain mais très attendu par la base dans les transports».
À l’avenir, les agents des transports (SUGE pour la SNCF et GPSR pour la RATP), pourraient – grâce au texte – faire des palpations préventives et saisir tout objet dangereux ou armes potentielles, sans présence obligatoire d’un officier de police judiciaire dans l’heure. Ils pourront également bloquer des personnes sur les parvis des gares si leur comportement semble dangereux. Contre les harceleurs ou auteurs de violences physiques, le projet de loi offre aussi la possibilité aux juges de prononcer une peine complémentaire d’interdiction d’entrée en gare et de sanctionner les «incivilités d’habitudes» (urine, dégradations, menaces…) qui pourrissent la vie des usagers et qui deviennent des délits passibles d’une amende de 3750 euros. Des moyens supplémentaires sont aussi prévus pour faciliter le recouvrement des peines financières, en passant par l’administration fiscale et le croisement des fichiers. Enfin, le sénateur Philippe Tabarot plaide pour le développement des technologies nouvelles, comme la pérennisation des «caméras-piétons» pour les agents et l’usage de la vidéoprotection pour les réquisitions judiciaires.
Le parlementaire de droite regrette que la gauche soit «encore dans la culture de l’excuse» face à ce problème d’insécurité dans les transports. La situation s’étant beaucoup dégradée depuis la loi Savary de référence (2016), Philippe Tabarot estime qu’il ne peut pas y avoir de réussite des transports tant que les Français, et notamment les femmes, auront des craintes pour leur sécurité. Il avait d’ailleurs souligné quelques chiffres préoccupants dans son argumentaire en s’appuyant sur un sondage selon lequel 46% des citoyens Français et 50% des Parisiens ne se sentiraient pas en sécurité dans les transports. En 2023, quelque 111.531 victimes de vols et violences y ont été recensées, tandis que plus de 4000 objets dangereux sur les emprises ferroviaires (hachoir de boucher, pic à glace, couteaux, batte de baseball, bonbonne de gaz, etc…) y ont été introduits.
Autant de dérives face auxquelles les députés seront bientôt invités à réagir, en évaluant la pertinence et l’urgence d’un texte imaginé au Sénat pour rendre l’intégralité des transports français plus fréquentables et plus sûrs.