Après une année 2023 «record» en termes de saisies, l’exécutif veut poursuivre sur sa lancée dans sa lutte sans merci contre la contrefaçon, dans l’optique notamment des Jeux olympiques. Le ministre délégué aux Comptes publics Thomas Cazenave a présenté vendredi à Aulnay-sous Bois (Seine-Saint-Denis) un nouveau plan gouvernemental anti-contrefaçons. Nouveau, car celui-ci prend la suite d’un premier plan, lancé en 2021, qui «constitue indéniablement un succès», s’est félicité Thomas Cazenave. En 2023, le nombre de saisies a quasiment doublé, avec 20,5 millions d’articles retirés du marché français, contre 11,5 millions en 2022 (et 9 millions en 2021).

La contrefaçon n’en finit pourtant pas de se développer, prenant même de nouvelles formes. «Des infracteurs se structurent en réseaux et adoptent des pratiques similaires à celles observées dans d’autres grands trafics comme ceux du tabac et de stupéfiants», a constaté le ministre délégué. Apparaissent notamment de petits ateliers d’assemblage de produits contrefaits dans les pays de l’Union européenne. «On voit émerger une forme de “made in France ” de la contrefaçon», a souligné Thomas Cazenave. «Nous devons donc muscler nos réponses et l’adapter à cette nouvelle menace», a-t-il lancé.

D’où le plan de lutte détaillé ce vendredi, «orienté vers l’identification et le démantèlement des réseaux organisés de fraude», et non plus seulement vers les saisies. Par exemple, le gouvernement affirme vouloir «renforcer la coopération entre les acteurs de lutte contre la fraude», notamment les services de l’État, la police, la gendarmerie ou encore la Répression des fraudes (DGCCRF). Le but : mener des opérations «coup de poing» en commun pour démanteler des réseaux de fraude, à l’image des opérations menées dans le cadre de la lutte contre les stupéfiants. «En particulier dans la période pré-Jeux olympiques, où risquent de se multiplier les ventes de produits contrefaits», a précisé Thomas Cazenave.

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Encore faut-il bien identifier, au préalable, les zones dans lesquelles les contrefacteurs s’approvisionnent et stockent leurs produits. Ce à quoi l’exécutif compte s’atteler, en cartographiant les «points chauds» de la contrefaçon. En cela, il compte sur l’aide des riverains. Avant les JO sera créée une plateforme web permettant à tout un chacun de signaler les points de vente à la sauvette de produits contrefaits.

L’autre grand pilier de ce plan concerne la lutte contre la contrefaçon sur internet, le commerce en ligne étant «devenu un vecteur de propagation privilégié des marchandises contrefaisantes», pointe le gouvernement, notamment via les sites de «dropshipping». Un réseau de 70 «cyberdouaniers» spécialement formés va ainsi être déployé pour traquer les contrefaçons sur internet.

Ces douaniers du web seront notamment invités à utiliser leur nouveau pouvoir «d’injonction numérique», créé par la loi du 18 juillet 2023, qui leur permet de sommer les opérateurs des plateformes en ligne d’être plus vigilants quant aux produits accessibles sur leurs sites. «Ils pourront également demander à une plateforme de déréférencer un vendeur de produits contrefaits, réaliser des enquêtes sous pseudonyme sur les réseaux sociaux, et aller jusqu’à l’acte d’achat pour constater l’infraction», a développé Thomas Cazenave.

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Sur ce volet numérique, l’État aimerait être davantage aidé par les grands sites de e-commerce, comme Amazon. La douane va donc se lancer dans «une phase de structuration des échanges d’informations avec les grandes plateformes de commerce en ligne en s’appuyant sur des protocoles de coopération», notamment pour lutter contre la prolifération d’annonces de contrefaçons, échanger des renseignements ou encore faire fermer des comptes de vendeurs. «Les discussions ont déjà été entamées avec les grandes plateformes, j’ai bon espoir qu’elles aboutissent», a fait savoir Thomas Cazenave.

Un défi pris à bras-le-corps par le ministre, jugeant que la contrefaçon est «une triple peine» : «C’est un fléau économique qui pénalise nos entreprises et nos finances publiques, avec des recettes fiscales qui ne rentrent pas», a déploré le ministre des Comptes publics. Il y a également «un enjeu de sécurité, car la contrefaçon finance des réseaux criminels, mafieux, terroristes». Enfin, «c’est un fléau sanitaire, car la plupart des produits ne respectent pas les normes environnementales et sanitaires». D’autant plus que la première catégorie de biens contrefaits saisis en 2023 concerne les jeux et jouets pour les enfants et les articles de sport (8,6 millions d’articles saisis).