Son coup d’éclat a fait grand bruit. Dimanche soir face au Racing 92, Nicolas Depoortère a inscrit un essai magistral. Puissant, véloce et élancé, le jeune trois-quarts centre de l’Union Bordeaux-Bègles (1,93 m pour 96 kg) a déchiré la défense francilienne d’une course folle de 80 mètres, avec une facilité déconcertante et une classe folle. «On a l’impression que c’est un joueur qui ne va pas très vite parce qu’il est très grand avec une longue foulée mais je vous assure que ça va très, très, très vite», a souri son talonneur et capitaine Maxime Lamothe.
Coup de projecteur puis accélération de particules. Avec la suspension de Jonathan Danty, le récent champion du monde U20 – qui avait auparavant été convoqué aux entraînements à Marcoussis – va avoir dimanche sa chance à l’étage supérieur. Avec le grand XV de France qui se déplace au pays de Galles (16h).
«C’est un rêve de gosse, salive-t-il. Je m’y attendais un peu en début de semaine, même si les entraîneurs avaient un peu changé le protocole des entraînements . J’étais tout le temps associé à Gaël, donc ça sentait plutôt bon. “Jo” (Danty) avait pris un carton au match précédent, et comme d’habitude, j’avais essayé de profiter de mon dernier match en club pour montrer le meilleur de moi-même avant de revenir ici. La rencontre s’était bien passée.» Et de basculer directement dans la peau d’un titulaire, à la place notamment de l’expérimenté Yoram Moefana ou d’Émilien Gailleton, son ancien compère chez les moins de 20 ans.
Depoortère débarque en Bleu avec l’étiquette de détonateur d’attaque. Le XV de France en aura bien besoin tant les trois premiers matches de cette édition 2024 ont été poussifs – voire soporifiques – sur le front de l’attaque. «Le groupe a été critiqué mais il est resté fort. C’est un groupe de très haut niveau qui sait rester soudé. Il n’y a pas de méchanceté entre les gars ou le staff. On reste vraiment concentrés sur ce qu’on doit faire», avance le joueur formé à l’US Izon en Gironde.
Pour ses grands débuts internationaux, il sera chaperonné par Gaël Fickou, le «papy» de l’attaque tricolore et joueur le plus expérimenté du groupe France avec ses 88 sélections depuis 2013. «Evoluer avec lui, c’est encore plus un rêve. Gaël est l’un des meilleurs centres qui puisse exister actuellement, et qui a fait partie de nombreuses générations de l’équipe de France. Il va vraiment m’apporter. C’est extraordinaire pour moi et mon avenir», se félicite-t-il. Loin d’être impressionné alors que tous les projecteurs sont braqués sur lui, le joueur de l’UBB fait partie de ces champions du monde U20 décomplexés et ambitieux, qui alimentent désormais l’équipe de France à flux tendu.
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Là encore, le prometteur centre – qui a été lancé en Top 14 en décembre 2022 – ne tire pas la couverture à lui : «Notre nouvelle génération bénéficie des grands qui nous entourent, que ce soit en club ou dans le XV de France. Nous sommes toujours bien intégrés et cela nous permet d’avoir confiance en nous et de bien nous exprimer.» Ce dimanche, dans le chaudron de Cardiff, il va évoluer au poste de premier centre, lui qui est plutôt un numéro 13. Pas un problème, à l’écouter. «Depuis le début des rassemblements, je m’entraîne en premier centre. Je demande des conseils à “Jo” et à Yoram, et même à Gaël qui a une grande expérience à cette position. Je suis bien entouré et je me sens à l’aise.» Pas de révolution à attendre en l’absence de Danty. «Les lancements sont les mêmes, même si nous avons deux types différents», confirme-t-il.
Le jeune homme paraît imperméable à la pression. À l’aise devant la presse, souriant, il sait bien ce qui l’attend au Principality Stadium. William Servat a planté le décor : «Pour moi, c’est peut-être l’un des plus beaux stades au monde. Rentrer dans ce stade, ça donne des frissons. Parfois, on n’arrive pas à se parler tellement il y a du bruit, c’est une ambiance incroyable avec des chants sur toute la rencontre.» Le jeune Depoortère a été mis au courant. «J’aurai peut-être une petite pression quand même : 80.000 personnes, ce n’est pas rien, reconnaît-il. Mais on va essayer de faire abstraction de tout ça pour rester “focus”.»
Ce grand moment, il va le vivre avec son grand copain Louis Bielle-Biarrey. Tous deux sont inséparables. «On a partagé nos premiers matchs en Espoirs, nos premiers matchs en U20, puis chez les pros, et maintenant je fête cette première avec lui en équipe de France. C’est une belle aventure qu’on fait ensemble, je suis très heureux de la partager avec lui.» Sa famille va aussi faire le déplacement à Cardiff. Grand sourire : «Ils attendaient que ce soit officiel, ils étaient à fond devant leurs ordinateurs !»