D’extérieur, la devanture est somme toute classique. Mais à l’intérieur, ce supermarché d’un nouveau genre propose une expérience-client tout à fait novatrice. Située à Asnières-sur-Seine, dans les Hauts-de-Seine, La Bonne Distrib’ a été conçue par Adrien Isaac, expert du commerce de détail, et Kelly Frank, ingénieure en science des aliments. Son principe ? Elle se veut entièrement dédiée au «vrai goût».
Concrètement, l’ambition de ce commerce de proximité de 300 m2 est de proposer des produits de qualité qui n’ont pas recours à la chimie alimentaire, contrairement à beaucoup de références que l’on trouve en grandes et moyennes surfaces. Dans ces points de vente, environ un produit sur deux est ultra-transformé, s’accordent à dire les experts. Malgré cette contrainte, tous les rayons classiques sont présents, à savoir l’épicerie, le primeur, la boulangerie, la crémerie, les surgelés, la cave, le snacking, les produits d’hygiène et d’entretien. Au total, pas moins de 2600 références sont proposées pour les achats du quotidien. La Bonne Distrib’ adopte par ailleurs une démarche de naturalité et de saisonnalité : en clair, ne comptez pas acheter des tomates en mars chez eux, il n’y en a tout simplement pas.
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L’accessibilité constitue l’un des piliers du projet. Pour Adrien Isaac, La Bonne Distrib’ «se situe au carrefour d’un magasin quotidien, d’une halle de marché et d’une boutique gourmet avec différentes gammes de produits qui permettent de répondre à tous les pouvoirs d’achat». Environ neuf références sur dix sont d’ailleurs certifiées bio. Pour parvenir à cet assortiment, le commerçant approvisionne ses rayons auprès des grossistes spécialisés Biodis et Relais Vert, lui permettant «de rassembler les références et faire baisser les frais logistiques». Des gammes qu’il complète avec des produits de fournisseurs directs, qu’on ne retrouve pas forcément dans les autres points de vente. Les produits artisanaux – tous testés par ses fondateurs – lui permettent de proposer des savoir-faire d’exception à un prix intéressant pour le client.
Pour parvenir à cet assortiment, les deux concepteurs ont adopté une démarche très rigoureuse. Tous les produits répondent à «un cahier des charges qui liste les ingrédients considérés comme ultra-transformés, disponible en open source et libre d’accès sur internet», précise Kelly Frank. Ainsi, pas moins de 500 ingrédients sont bannis du supermarché. La scientifique qualifie cette démarche de «drastique», car «il faut faire du cas par cas pour savoir si on peut faire rentrer les références ou non». Une démarche dont elle est fière. «Ça permet aux gens de manger mieux et d’inciter les fabricants à améliorer leurs procédés», estime-t-elle. Pour le client, cela se traduit par un logo «Ingrédients simples» apposé sur les produits, qui prouve que le fabricant a respecté le cahier des charges. Plus besoin «de devoir retourner les étiquettes pour s’assurer qu’un produit est bon pour la santé».
Derrière ce pari technique, La Bonne Distrib’ n’en cherche pas moins à être un lieu convivial. Les équipes du supermarché ont apporté un soin tout particulier à véhiculer «un message positif sans être moralisateur». Et même dès le départ avec leur logo «en forme de bonhomme qui a bien mangé et souriant». Fondé sur le principe du «What is in it for me now» – comprenez l’intérêt personnel et immédiat -, le point de vente est ouvert tous les jours de la semaine pour permettre aux clients de venir faire leurs courses à tout moment, quel que soit le besoin. Pour obtenir cet aspect convivial, les deux fondateurs se sont entourés d’architectes, les mêmes à l’origine de la refonte de Monoprix il y a quelques années. Une zone baptisée «Ici on goûte» permet aux clients de tester des produits en fonction de la saisonnalité et de mettre en avant leur «vrai goût».
Le nouveau supermarché insiste également sur sa démarche solidaire, avec son partenariat avec Hop Hop Food pour permettre à des personnes dans le besoin de bénéficier chaque jour de paniers anti-gaspi. L’éco-responsabilité est aussi de mise, avec les consignes rapportées par les clients. Avec ce concept, «il s’agit de retrouver le sens du mot “commerce”», commente Adrien Isaac. Un pied de nez à la grande distribution pour celui qui a longtemps travaillé dans un supermarché Auchan. La Bonne Distrib’ affirme ainsi se fixer «une marge de 30%», bien moindre que celle de la grande distribution, où elle atteint parfois les 70%. Quant aux prix pratiqués pour le client, ils sont dans «la lignée du Franprix et du Carrefour d’à côté», mais «en dessous de Naturalia et Biocoop», affirme-t-on chez La Bonne Distrib’.
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L’ouverture du premier point de vente intervient dans «un contexte de fatigue alimentaire de la part des Français», estime Kelly Frank. En février dernier, une étude de l’Agence Bio mettait en lumière «le basculement d’une l’alimentation axée sur des préoccupations santé et environnement vers une alimentation plaisir». Pour Adrien Isaac, La Bonne Distrib’ «cherche à inspirer, pas à être militante», en sortant de l’approche culpabilisante. Le but est de «sortir du sans sucre, du sans sel, pour donner au client la possibilité de faire ses choix en toute conscience», résume de son côté la scientifique. De fait, le supermarché sert de laboratoire à GOÛM, une agence d’accompagnement des marques que Kelly Frank a créée. Au-delà de ce projet, «c’est l’occasion d’échanger avec les fabricants pour améliorer les recettes et les aider sur le goût lors de l’élaboration de ces dernières», note-t-elle.
Après un mois d’ouverture, les fondateurs du lieu saluent les premiers retours de leurs clients. «Certains venaient acheter quelques produits pour nos débuts, ils reviennent désormais pour faire leur plein de la semaine», se félicitent-ils. La Bonne Distribution ne veut pas s’arrêter là et table sur quatre ouvertures cette année en région parisienne, avec l’ambition ensuite d’exporter son modèle dans le reste de la France.
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