Tombé mardi, le couperet de l’Insee a prestement laissé place à celui de Gabriel Attal mercredi. Au lendemain du dérapage du déficit public à 5,5% du PIB pour 2023, le premier ministre s’est rendu sur le plateau du «20 Heures» de TF1 pour dévoiler les arbitrages du gouvernement, actés plus tôt dans la journée lors d’un séminaire sur le travail à Matignon. Faisant sienne la sémantique de la «rigueur», jusqu’alors taboue, le chef du gouvernement s’est engagé à rétablir les finances publiques d’ici 2027.
S’il s’est refusé à augmenter les impôts pour les classes moyennes et les entreprises, Gabriel Attal s’est mis en tête de chercher des économies du côté de l’assurance chômage. Misant sur une entrée en vigueur «à l’automne», l’ancien ministre des Comptes publics a annoncé une réforme «cette année». Le locataire de Matignon a mis «plusieurs paramètres» sur la table, dont la durée de l’indemnisation et le temps de travail pour bénéficier du chômage. Tout en confiant sa «préférence» pour l’évolution du montant d’indemnisation du chômage.
Le premier ministre a certes tenté de prévenir les critiques. «Mon objectif, ce n’est pas de m’en prendre à tel individu ou aux chômeurs, c’est de faire bouger un système pour inciter davantage à la reprise d’emploi», s’est-il défendu. Sans parvenir à empêcher les oppositions de monter au créneau. En lice pour les élections européennes, la numéro 1 de la liste de La France insoumise (LFI) Manon Aubry a ainsi appelé les électeurs à déposer un bulletin insoumis le 9 juin pour rejeter une réforme qui «fai[t] la poche des chômeurs plutôt que des profiteurs».
Même son de cloche chez son camarade de l’Assemblée nationale, Adrien Quatennens qui pointe des «riches épargnés» par les annonces de Gabriel Attal. «Les Français vont encore trinquer. Assez ! Le chômage est une souffrance. Il y a moins d’emplois non pourvus que de chômeurs. Vivement l’opération “place nette XXL” du peuple contre ce gouvernement des riches, par les riches, pour les riches !», a écrit sur X le député du Nord.
Chez les communistes, on livre un «résumé d’Attal au 20h» cinglant. «Les pauvres sont responsables de leur pauvreté, les chômeurs de leur chômage, les malades de leur maladie. En revanche, les grosses boîtes vont pouvoir continuer à se gaver tranquilles», a schématisé le sénateur Ian Brossat sur X.
Tandis que le secrétaire national du PCF Fabien Roussel s’en est pris aux «cadeaux aux grandes fortunes et aux actionnaires» faits par le gouvernement. La même indignation se fait entendre chez le patron du Parti socialiste (PS) Olivier Faure : «Pendant que le CAC 40 sable le champagne sur fond de records de dividendes, Attal pointe ceux qui ont eu le malheur de perdre leur emploi. Attal, le cynisme tranquille.»
À droite, où l’on appelle à une réforme de l’État et du modèle social, Olivier Marleix, chef de file des députés Les Républicains (LR), s’est désolé d’une coupe budgétaire absurde. «En 2024 l’assurance chômage sera excédentaire de 3 Mds€. Où croyez-vous que le gouvernement propose un effort ? Chômeurs âgés, transports sanitaires… oui», a-t-il ironisé. Et d’ajouter, lapidaire : «Train de vie de l’État… rien.»
Même constat de la patronne des députés du Rassemblement national (RN) : «Le régime est excédentaire, il n’y a aucune nécessité à le réformer !», s’est indignée Marine Le Pen. Laquelle dénonce «une escroquerie qui n’a qu’un seul but : faire les poches des Français pour renflouer les comptes de l’État qui sont en déficit à cause de l’impéritie du Gouvernement.» Son bras droit, lui, préfère mettre l’accent sur les propositions budgétaires du parti à la flamme. «Rien sur la réservation des aides sociales aux seuls citoyens français, rien sur le déverrouillage de la croissance. C’est à la fois mesquin et insuffisant», a écrit sur X la tête d’affiche lepéniste pour les européennes, Jordan Bardella.
Porteuse d’une voix dissonante, la tête de liste Reconquête ! Marion Maréchal ne trouve «pas choquant que l’on puisse toucher à la durée d’indemnisation» de l’assurance chômage.