Notre envoyé spécial à Liévin
«Un événement tel qu’on est en train de le vivre est exceptionnel. Il y a dix ou quinze ans, c’était impensable. Cela veut dire que la considération du handicap est réellement en train de changer. Aujourd’hui, certes on parle de paralympisme, mais en fait on parle surtout de sport. C’est ce qui nous rassemble et qui nous donne envie de nous dépasser.» Devant une assemblée d’environ 180 étudiants des Hauts de France réunie à l’Arena Stade couvert de Liévin, Théo Curin (4e du 200m nage libre aux Jeux paralympiques de Rio en 2016) a rendu un bel hommage à l’événement organisé par EDF autour d’une découverte-initiation grandeur nature de ce qu’est le paratriathlon en particulier, et le parasport en général.
Une opinion partagée d’ailleurs par les étudiants, dont Matthis, en L3 Staps à Valenciennes : «Le regard a changé. Il y a davantage de sensibilisation à l’école, au collège et au lycée sur la question du handicap. C’est une bonne chose pour faire progresser les mentalités.» Violaine, sa coéquipière lors du paratriathlon, abonde dans son sens. «Je pense que le regard sur le handicap évolue et qu’il n’est plus vu comme quelque chose à part. Tout est confondu désormais et tout le monde considère ce que font les para-athlètes comme une réelle performance sportive, indépendamment de leur handicap. Ils ont beaucoup de mérite.»
C’est donc dans une ambiance très enthousiaste, et avec un réel esprit de compétition, que les étudiants ont disputé qualifications et demi-finales ce jeudi du paratriathlon afin de décrocher leur place pour la finale, qui se déroulera ce samedi 29 mars en lever de rideau de l’épreuve de Coupe du monde de triathlon en indoor dans la magnifique enceinte de Liévin. Une motivation qui aura même conduit, lors de la dernière demi-finale, une jeune étudiante à une douloureuse chute à quelques mètres de la ligne, lors de la course les yeux bandés succédant à un 100m de natation les jambes liées au niveau des chevilles et à cinq tours de piste en handbike, un vélo adapté permettant de pédaler à la force des… bras, et non des jambes.
Des expériences forcément déstabilisantes pour ces étudiants. «C’est la première fois que je participe à ce type d’épreuves», nous confiait Matthis. «Le plus déstabilisant est, selon moi, la course à pied pour celui qui a les yeux bandés, qui n’a donc aucun repère et doit faire une totale confiance à son partenaire. Ce n’est vraiment pas simple. Pour la natation en revanche, comme je pratique le water-polo depuis plusieurs années, cela n’a pas été un problème d’avoir les jambes attachées. Je me suis bien débrouillé.» Son de cloche différent pour Violaine : «Je suis cycliste et là, sur le handbike, ce n’est pas simple de faire du vélo avec les bras. En cours, vu que je suis en activité physique adaptée, j’avais en revanche déjà testé la natation sans les jambes et la course à pied en aveugle. Cela change totalement au niveau sensoriel et on est vite perdu, donc cela demande un entraînement régulier.»
Mais les étudiants n’ont pas été les seuls à se prêter à l’exercice puisque plusieurs athlètes et para-athlètes du Team EDF étaient également présents, et se sont prêtés au jeu en compagnie de quelques influenceurs, dont Domingo. Ainsi, il fut surprenant de voir Romain Cannone, champion olympique à Tokyo en 2021 à l’épée, tirer son épingle du jeu dans l’eau, et encore plus au guidon de son handbike avec lequel il a repris Dorian Foulon, récent triple champion du monde de paracyclisme sur piste à Rio, parti comme un boulet de canon mais exténué sur les derniers tours. Ou encore Heïdi Gaugain, élue championne des championnes françaises para par le quotidien L’Equipe en 2023 après ses exploits en cyclisme aussi bien chez les non-valides que chez les valides, en mode course à pied, les yeux bandés. Un vrai moment de convivialité disputé dans une ambiance festive et bruyante.
L’occasion pour Alexandre Boulleray, responsable du sponsoring sportif pour EDF, de rappeler que la compagnie de production et de fourniture d’électricité «est engagée auprès de la Fédération française de handisport depuis 32 ans. Nous avons été son premier partenaire. Nous soutenons les parasports et les parasportifs depuis cette période et avec la signature de notre partenariat avec Paris 2024, nous avons mis en place un programme, «Enjeux d’avenir 2024», dans lequel on s’engage à faire changer le regard sur le handicap d’une part, et favoriser l’apprentissage de la nage d’autre part. Soit deux sujets sociétaux importants dans la société française. D’organiser un événement tel que celui-ci à Liévin permet de toucher la jeunesse et de faire découvrir aux jeunes le parasport. Nous allons organiser pour la première fois en France les Jeux paralympiques et il s’agit d’une formidable opportunité de parler du handicap dans la société, de l’insertion professionnelle.» Nul doute qu’avec des événements tels que ce paratriathlon à Liévin contribueront à faire évoluer les mentalités.