«C’est le meilleur nageur de la planète actuellement, sans aucune discussion possible (…) Il y en a un comme lui par génération : il y a eu Johnny Weissmuller, Mark Spitz, peut-être Ian Thorpe, puis Michael Phelps, et aujourd’hui donc, Léon Marchand.» Difficile de rendre plus bel hommage au nageur français que celui de Rowdy Gaines à l’issue des finales NCAA disputées dans une ambiance exceptionnelle, symbolique de celle du sport universitaire américain.

Le champion olympique du 100m nage libre aux JO de Los Angeles en 1984, et accessoirement quintuple champion du monde, a fait part de son admiration pour Léon Marchand auprès de nos confrères de France Info : «Il a reçu de bons gènes, surtout grâce à son père (Xavier, double finaliste olympique en 1996 et 2000) qui était un athlète incroyable. Ensuite, de ce que j’ai vu de Léon jusqu’ici, c’est un nageur très humble. Bien sûr qu’il est affamé mais il n’essaie pas d’impressionner qui que ce soit. Il fait juste ce qu’il a à faire. Et je pense que s’il garde cette humilité et cette élégance, il ira loin. J’espère que ça ne lui montera pas à la tête. Pour le moment, ce n’est pas le cas. Et quand bien même, s’il prenait la grosse tête, je ne lui jetterais pas la pierre, il le mérite presque. Au-delà de son éthique de travail, il est incroyablement aquatique.»

Des propos dithyrambiques logiques pour un Rowdy Gaines aux premières loges, dans son rôle de commentateur pour ESPN, pour assister à la démonstration de force réalisée par le nageur français lors des finales universitaires qui se sont déroulés jusqu’à dimanche à Indianapolis. Avec trois titres en individuel, Léon Marchand a pris une part majeure dans le succès final de son université, Arizona State, qui n’avait encore jamais eu cet honneur. Mais au-delà de ses succès, le Français de 21 ans a essentiellement impressionné par ses chronos. Notamment celui du 500 yards (environ 460 mètres) puisque lors de cette compétition, les distances se calculent ainsi et pas en mètres comme aux Jeux par exemple. En 4’02″31, Léon Marchand a tout simplement atomisé son record précédent de presque quatre secondes qu’il détenait lui-même depuis le début du mois de mars. Sur une distance, faut-il le rappeler, qu’il a très peu nagé et qu’il découvre.

«J’avais battu ce record il y a deux semaines alors que je n’étais pas rasé et moins bien préparé qu’aujourd’hui, et je voulais à nouveau battre ce record», commentait alors le principal intéressé. «Le temps, 4’02 » c’est quand même fou. Je savais que je pouvais le faire bien sûr. Mon temps de passage au 200m est assez dingue et sur la seconde partie, je me suis juste dit : tiens le coup ! C’était une course qui fait mal mais c’était fun.» A noter qu’il a également remporté le 200 yards brasse en baissant son record à 1’46 »35 (contre 1’46 »91 en 2023). Seule sa victoire sur le 400 yards 4 nages en 3’32 »12 est restée à distance de son propre record universitaire (3’28 »82) établi l’an dernier. Le tout en se montrant brillant aussi lors des relais. De quoi dresser un bilan forcément positif. «Je pense que je n’ai jamais vécu un truc aussi intense. Et, surtout, le partager avec tous ses potes, c’était énorme (…) Au niveau des objectifs personnels, je suis content parce que je me suis bien amélioré en crawl et en brasse. Je me suis surpris sur quelques courses. Vraiment, je ne pensais pas être capable de faire ça.»

Une opinion partagée par son entraîneur Bob Bowman, qui confiait son sentiment au journal L’Equipe : «Il a su élever son niveau. Il a progressé dans sa technique en crawl. Il avait peut-être des appuis un peu trop fuyants, on a travaillé pour qu’il soit plus efficace dans sa propulsion, qu’il prenne plus d’eau. Il a grandi, il n’est plus le petit garçon que j’ai connu il y a trois ans, il est devenu un jeune homme. Il a gagné en maturité, en même temps qu’il est devenu plus fort, plus puissant.» De quoi envisager la suite avec appétit pour celui qui devra encore aller chercher sa qualification aux Jeux lors des Championnats de France en grand bassin à Chartres du 11 au 16 juin, après avoir passé ses examens de fin de semestre à Phoenix en mai (études d’informatique). Ensuite, il sera temps de voir jusqu’où Léon marchand peut-il aller lors de ces JO 2024 lors desquels, potentiellement, il pourrait viser la bagatelle de quatre titres olympiques en individuel (200 et 400 m 4 nages, 200 m papillon et 200 m brasse). Et sur ce qu’il a montré à Indianapolis, un tel objectif n’a plus rien d’une chimère.