Roquebrune-Cap-Martin, dans les Alpes-Maritimes, à 5 kilomètres de Monaco. Pendant que certains privilégiés se prélassent le long de la plage de Saint-Roman, une centaine de mètres plus haut dans les terres, entre le boulevard de Larvotto et l’avenue de France, une certaine agitation règne. Comme chaque année, à l’aube du mois d’avril, le Monte-Carlo Country Club accueille sur ses courts le Rolex Monte-Carlo Masters. Comme un symbole, le troisième Master 1000 de la saison annonce le lancement de la saison de terre battue. Certes, quelques tournois ATP 250 ont déjà organisé leur compétition sur l’ocre, comme Rio ou Buenos Aires, mais Monte-Carlo est celui sur lequel les meilleurs joueurs mondiaux viennent se tester.
Sur le court Rainier III, du nom du souverain monégasque ayant régné sur la principauté de 1949 à 2005, le public français n’est jamais certain d’être majoritaire. Les courts du Monte-Carlo Country Club ne sont situés qu’à une heure de l’Italie. Nos voisins transalpins, férus de balle jaune, n’hésitent pas à traverser la frontière entre Menton et Grimaldi, pour venir observer le gratin du tennis mondial. Un choix assez logique pour de nombreuses villes nord italiennes bien plus proche de Monte-Carlo que du Master 1000 de Rome. Les Turinois n’ont besoin que de 3h30 de route quand un déplacement à Rome leur prendrait plus de 7 heures. De même pour les Génois avec 2h15 contre 6 heures, et Milan avec 4 heures contre 6 pour la capitale italienne.
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En 2019, Rafael Nadal, particulièrement apprécié du public français et idolâtré à Roland-Garros, a connu un traitement moins favorable dans le sud. Lors de sa demi-finale face à l’Italien Fabio Fognini en 2019, la foule s’était rangée derrière le sanguin Italien.
Lors de la dernière décennie, rare sont ceux qui ont réussi à faire le doublé Monte-Carlo / Roland-Garros. À vrai dire, seul Rafael Nadal, à deux reprises, a réussi cet exploit en 2017 et 2018.
Plusieurs conditions peuvent expliquer ces variations. Au-delà du format en 2 sets contre 3 aux Internationaux de France, les conditions de jeu varient. En posant ses valises à Roquebrune, le circuit mondial arrive en provenance de terrains en surfaces «dures», et n’a pas développé ses réflexes pour le jeu exigeant de la terre. Le vent est également à prendre en compte. Moins protégé que Roland-Garros, les courts du Monte Carlo Country Club poussent les joueurs a s’adapter au vent, provoquant un jeu parfois très arrondi.
Monte Carlo reste ces dernières années un tournoi particulièrement indécis. Les 3 derniers vainqueurs du tournoi, Andrey Rublev, Stefanos Tsitsipas et Fabio Fognini n’ont jamais remporté un autre master 1000 de leur carrière, tout comme le français Cédric Pioline, vainqueur en 2000 de la compétition. À l’inverse, Monte-Carlo demeure le seul Master 1000 manquant au palmarès de la légende Roger Federer.
Monte-Carlo est aujourd’hui indéboulonnable du calendrier tennistique et parmi les meilleurs tournois mondiaux. Pourtant, en 2007, un orage a survolé l’épreuve. Le circuit ATP souhaitait réduire le nombre de tournois de Masters Series pour valoriser davantage d’autres compétitions. L’instance prévoit alors de déclasser les tournois d’Hambourg, Rome et Monte-Carlo, au profil notamment du futur tournoi de Shangaï. La puissance financière chinoise avait attiré l’ATP qui entreprenait alors des démarches pour installer son circuit dans l’Empire du milieu.
Face à ce mouvement, 65 joueurs ont signé un texte pour montrer leur désaccord avec la mesure. Parmi eux, les deux figures de l’époque, Roger Federer et Rafael Nadal. «Monte-Carlo est un tournoi que j’apprécie beaucoup, qui fait peut-être deux fois moins d’entrées que d’autres, mais pèse beaucoup sur le plan historique» déclarait le Suisse, tandis que le taureau de Manacor indiquait que «ce serait très grave de toucher à ces tournois».
Les organisateurs monégasques lanceront même une plainte contre l’ATP, avant de trouver un accord avec l’instance. La déposition sera retirée, et le tournoi conservera son prestigieux rang jusqu’à aujourd’hui.
Cette année, de nombreuses incertitudes planent sur les performances des meilleurs mondiaux. Battu à Indian Wells par le 123e mondial Luca Nardi, et défait par Sinner en Australie, Novak Djokovic est attendu au tournant, lui qui n’a pas remporté le moindre tournoi en 2024. Le tournoi semble davantage taillé pour l’énergie de Carlos Alcaraz ou la puissance de Sinner et Rublev. Casper Ruud, finaliste des deux dernières éditions aura aussi sa carte à jouer. Au rang de surprise, attention à Alex De Minaur sorti d’une très belle saison sur dur (victoire à Acapulco, finale à Rotterdam), 5e à la Race, qui peut prolonger sa bonne dynamique.
Côté tricolore, Ugo Humbert (tête de série n°14) et Gaël Monfils sont les Français les plus à même de briller sur la terre battue. La Monf’ pourrait même créer l’exploit au deuxième tour face à Daniil Medvedev.