Chaque année, jusqu’à 27 millions de consultations seraient perdues en raison des «lapins» posés par les patients qui n’honorent pas leurs rendez-vous médicaux, selon l’Ordre des médecins et certains syndicats comme l’UFML. Une réalité inacceptable pour le premier ministre Gabriel Attal, qui entend «reconquérir du temps médical» en mettant en place une « taxe lapin ». Sur le papier, beaucoup sont favorables à l’instauration de ce prélèvement de 5 euros à chaque rendez-vous non honoré mais peu sont capables de dire quelle forme celle-ci pourrait prendre. Un prélèvement directement depuis Doctolib ? Une empreinte de carte bancaire à laisser au moment de la prise de rendez-vous ? Quid des rendez-vous médicaux tiers-payant lors desquels il n’est pas nécessaire d’avancer les frais ?
En attendant de connaître les modalités exactes de cette mesure en préparation, qui nécessite la mise de toutes les façons la votation d’une nouvelle loi, voici les réponses aux principales questions que se posent à la fois les professionnels de santé que les patients.
Cinq euros. C’est le montant de la pénalité financière que le premier ministre Gabriel Attal voudrait appliquer à chaque rendez-vous médical non-honoré.
Dans quel but ? Selon Matignon, cette taxe permettrait de «répondre au souci majeur des Français», à la fois «l’accès aux médecins» et «la capacité de trouver un rendez-vous dans des délais acceptables». Et l’objectif est ambitieux, puisque le gouvernement affiche sa la volonté de récupérer ainsi 15 à 20 millions de créneaux médicaux.
Sur le principe, toute personne qui prendra un rendez-vous médical pour lui ou pour ses enfants pourra payer cette pénalité si elle décide de ne pas l’honorer. L’idée étant de sanctionner le patient qui ne se serait pas présenté et qui n’aurait pas prévenu au moins 24 heures à l’avance. À noter néanmoins que cette pénalité restera à la main du médecin, qui pourra décider de ne pas l’appliquer s’il juge les raisons du patient valables.
Qui dit «taxe» dit impôt prélevé par l’État. Là, en l’occurrence, malgré la confusion induite par le terme taxe, il s’agirait bien de reverser les 5 euros aux professionnels de santé concernés au titre d’«indemnisation», et restera au bénéfice du médecin qui aura la mission de le signaler. non au profit des finances publiques de l’État.
En 2023 déjà, lors de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, l’idée d’une «taxe lapin» était discutée. À l’époque, il s’agissait de réclamer, en cas de «no show», une somme forfaitaire fixée par décret au bénéfice de l’assurance maladie. Les sénateurs ne s’interdisant pas qu’une partie de cette somme puisse, ensuite, être reversée directement aux professionnels.
C’est là toute la question qui reste en suspens, car s’il est possible d’imaginer laisser une empreinte bancaire au moment de la prise de rendez-vous sur Doctolib, difficile de faire pareil lorsqu’on a des rendez-vous réguliers à l’hôpital par exemple. La somme pourra être retenue via l’empreinte bancaire par les plateformes de prise de rendez-vous ou par les soignants eux-mêmes en cas de prise de rendez-vous en direct.
Interrogé à ce sujet sur Franceinfo, le ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention Frédéric Valletoux a assuré ce lundi que la mise en place de cette «taxe lapin» était «techniquement […] tout à fait faisable». Il a ainsi expliqué «que les patients qui prendront rendez-vous laisseront leurs coordonnées bancaires sur les plateformes de réservation».
Pour les professionnels absents de ces plateformes, «les médecins auront la possibilité de demander des coordonnées bancaires» par téléphone. Leurs secrétariats «pourront appeler les patients pour confirmer les rendez-vous». Et s’ils ne se présentent pas, «les médecins pourront toujours leur demander cinq euros à la prochaine consultation», a également fait savoir la ministre du TravailCatherine Vautrin sur RTL, sans préciser le cas où le patient ne reviendrait jamais chez le praticien.
Lors de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale au Parlement fin 2023, la sénatrice Corinne Imbert évoquait une autre solution : celle que la somme puisse «être réglée directement par l’assuré à sa caisse, prélevée sur son compte bancaire avec son autorisation ou récupérée, par l’organisme d’assurance maladie, sur les prestations de toute nature à venir».
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Cette mesure nécessite une loi, rapidement examinée par le Parlement selon les dires de Matignon, qui «espère» une entrée en vigueur dès 2025. Concrètement, le gouvernement souhaite qu’elle puisse être mise en place à partir du 1er janvier 2025, sur les plateformes de rendez-vous en ligne type Doctolib.
Il existe un équivalent de la «taxe lapin» à l’étranger. En Allemagne notamment, où les patients règlent 5 euros lors de la prise de rendez-vous. Cette somme restant ensuite acquise au professionnel en cas de non-présentation.