« J’ai eu beaucoup de chance », Lionel Ribes remercie encore sa mère qui cherchait à comprendre la cause de son propre taux de cholestérol trop élevé. Consultation avec le Pr Jean-Luc de Gennes de la Pitié-Salpêtrière à Paris : quand le médecin la reçoit, il demande tout de suite à recevoir ses enfants. Lionel est bientôt majeur, il est sportif, en bonne santé, mais ses analyses sanguines révèlent, comme il nous le raconte, un taux de cholestérol « faramineux ».
Une hypercholestérolémie familiale (HF) est diagnostiquée et le traitement commence. Aujourd’hui âgé d’une cinquantaine d’années, Lionel Ribes est président de l’Association nationale des hypercholestérolémies familiales et lipoprotéines (a) (Anhet.f). Il se dit chanceux, car en France, la très grande majorité des malades ne sont pas diagnostiqués, ce qui leur fait courir des risques graves. En effet, cette maladie silencieuse ne présente pas de symptômes particuliers jusqu’au premier : l’accident cardiaque. Avec son association, il milite pour un diagnostic universel.
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Noël Peretti, pédiatre et professeur de nutrition, chef du service de gastro-entérologie et hépatologie au CHU de Lyon, soutient cette revendication et nous décrit cette maladie génétique qui empêche le cholestérol d’entrer dans les cellules du foie, qui ont pour fonction de l’éliminer, causant ainsi son accumulation dans le sang et sur la paroi des artères. Ce phénomène entraîne des dépôts graisseux (plaques d’athérome) qui conduisent à la réduction du flux sanguin. Sans que l’on en connaisse la raison précise, ce sont les artères cardiaques qui sont particulièrement touchées, ayant comme conséquence, en absence de traitement, un risque d’infarctus élevé.
Deux formes de la maladie existent – homozygote ou hétérozygote – selon que les deux versions du gène sont touchées ou non. La première est très grave, pouvant entraîner une mort subite précoce dès l’enfance, si elle n’est pas traitée. Elle est heureusement rare (une personne touchée sur 250.000 en France). La forme hétérozygote est beaucoup plus fréquente, 1 personne sur 300 dans notre pays. Cette dernière, si elle est diagnostiquée jeune, est traitable. En prenant des médicaments, il est possible de maintenir un taux de cholestérol correct, d’éviter son accumulation sur les parois des artères et de prévenir les accidents cardiaques qui surviennent souvent chez des adultes jeunes.
Le 28 novembre dernier l’association Anhet.f a publié un livre blanc pour alerter sur le manque de diagnostic et proposer un dépistage universel précoce de l’hypercholestérolémie familiale, ce qui serait « la seule solution pour sauver des milliers de vies ». Cette publication met en avant le travail de l’économiste de la santé, Gérard de Pouvourville, qui estime qu’un dépistage à un âge précoce permettrait de faire gagner en moyenne huit années de vie pour chaque enfant dépisté. Le diagnostic pourrait être établi relativement facilement via un dosage lipidique à partir d’une prise de sang réalisée dans le cadre de l’une des visites médicales obligatoires du parcours de soins des enfants.
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L’association souhaite aller plus loin que les recommandations de la Haute Autorité de santé qui préconise jusqu’à présent de ne dépister que les membres d’une famille à partir d’un patient, diagnostiqué par hasard, le plus souvent après un premier accident cardiovasculaire. Le livre blanc est aujourd’hui sur le bureau du ministre de la Santé. Charge à lui et au Parlement de se saisir du dossier.