La France a remis dimanche 14 avril à la Nobel de littérature autrichienne Elfriede Jelinek les insignes de commandeur dans l’ordre des Arts et des Lettres, venant récompenser une œuvre «monumentale» et «vigilante». Sa littérature «nous aide à reconstruire notre esprit critique dans le respect des valeurs universelles auxquelles nous croyons», a déclaré l’ambassadeur de France Gilles Pécout lors de la cérémonie en petit comité à Vienne, à laquelle assistait l’AFP.
Elle «concourt toujours à la liberté et le plus souvent à la liberté des plus faibles», a ajouté le diplomate, récemment nommé président de la Bibliothèque nationale de France.
La femme de lettres, qui n’apparaît que très rarement en public et décline d’ordinaire les honneurs, a «remercié» la France et évoqué sa relation avec la langue française, «venue de l’enfance» et qu’elle maîtrise très bien.
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Elfriede Jelinek, 77 ans, est un des écrivains de langue allemande les plus lus et les plus étudiés en France. Depuis 2009, elle fait partie des dix auteurs germanophones prescrits par l’Éducation nationale. Elle a été traduite en français pour la première fois en 1988 et son livre Les Amantes figure dans la liste des 100 meilleurs romans du monde, établie par le quotidien Le Monde en 2019. Son œuvre débute en 1967 avec un premier recueil de poésie. Puis s’emparant de faits divers, elle est pionnière dans la dénonciation d’une violence sexuelle systémique contre les femmes, dont le langage décidé par les hommes est un vecteur. Elle est l’une des toutes premières à ouvrir un site internet dès les années 1990.
La Pianiste de Michael Haneke, en 2001, d’après le roman d’Elfriede Jelinek, avec Isabelle Huppert, Benoït Magimel, Annie Girardot, Eva Green….
Son travail expérimental incessant sur la maîtrise de la langue la fait connaître en dehors du monde germanique et son roman La pianiste (Grand Prix du jury à Cannes) est adapté en 2001 par Michael Haneke au cinéma. Isabelle Huppert, rôle principal dans le film, qui a reçu le prix d’interprétation du Festival cannois en 2001, reconnaît en Elfriede Jelinek un «grand écrivain classique».
En 2004, elle rejoint le cercle très fermé des femmes distinguées par le prix Nobel de littérature. L’académie loue l’importance de son langage, qui démontre comment «les clichés de l’industrie du divertissement» paralysent la résistance «aux injustices de classe et à la domination sexuelle». Elfriede Jelinek est aussi l’auteur de nombreuses pièces de théâtre dans lesquelles elle aborde toutes les questions d’actualité et dont les premières font toujours l’événement dans le monde germanique.