Cela faisait un an que les 18 membres de la «Commission pour l’autodétermination en matière de reproduction et la médecine de la reproduction» – mise sur pied par la coalition au pouvoir – devisaient au sujet d’une éventuelle reforme des textes juridiques qui encadrent actuellement les interruptions volontaires de grossesse (IVG). Finalement, la décision rendue par les médecins et spécialistes du droit et de l’éthique réunis au sein de la commission mise en place par Olaf Scholz est sans équivoque : il faudrait autoriser les femmes à avorter au cours des douze premières semaines de leur grossesse.

Le groupe de travail sur l’avortement a fait part de ses conclusions le 8 avril dernier, annonçant qu’il recommandait de légaliser les IVG effectuées lors des douze premières semaines de gestation, alors que celles-ci sont jusqu’à présent considérées comme illégales en vertu de l’article 218 du Code pénal allemand. En effet, ce dernier dispose que «quiconque met fin à une grossesse sera puni d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans ou d’une amende», puis précise : «Ne sont pas considérés comme des avortements au sens de cette loi les actes qui prennent effet avant que l’ovule fécondé ait achevé son implantation dans l’utérus».

Pour en arriver à un tel verdict, les experts ont suivi le raisonnement suivant, rapporté par Der Spiegel : les «inquiétudes de l’enfant à naître et les inquiétudes de la femme enceinte» devraient être pondérées de façon distincte en fonction du stade de la grossesse. «Le droit à la vie n’a pas le même poids avant et après la naissance», a d’ailleurs expliqué la professeure de droit Frauke Brosius-Gersdorf à l’hebdomadaire hambourgeois.

Toutefois, la probabilité que l’avis des experts soit rapidement converti en mesures législatives semble assez mince étant donné la division des coalisés concernant les questions éthiques. Par exemple, les sociaux-démocrates et le parti écologiste Les Verts avaient annoncé leur volonté d’abroger l’article 218 du Code pénal lors de la campagne de 2021, mais n’ont finalement pas procédé à une telle suppression à cause des dissensions internes à la coalition.

Après que le rapport a été rendu public, des membres de l’opposition, insatisfaits des résultats, ont émis de vives critiques. Thorsten Frei, député du groupe parlementaire CDU (l’Union des chrétiens-démocrates) a même affirmé le 9 avril dernier que son groupe porterait plainte si la coalition au pouvoir en venait à appliquer les recommandations du symposium. De son côté, l’Église d’Allemagne a également exprimé son opposition, le président de la Conférence des évêques catholiques, Monseigneur Georg Bätzing, ayant accusé la commission de ne pas reconnaître le droit à la vie des futurs nouveau-nés ainsi que leur dignité humaine, rapporte la radio publique allemande MDR.

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Reste à voir la décision que prendront les autorités à la suite de la récente publication des résultats de la consultation. Pour l’heure, les ministres responsables de la question paraissent prudents. À ce titre, Christiane Hoffmann, porte-parole adjointe du gouvernement, a annoncé lundi à Berlin que le sujet est «très sensible» qu’il a trait à des domaines «très personnels», d’après MDR. Quant au ministre de la Santé Karl Lauterbach, celui-ci estime qu’un amendement de la loi en vigueur nécessite un large consensus social et parlementaire. Enfin, le ministre fédéral de la Justice, Marco Buschmann, a annoncé qu’il procéderait d’abord à une évaluation approfondie du rapport.