Le miroir aux alouettes de la transition énergétique. Le PDG du géant français de l’énergie TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a estimé dimanche au Forum économique mondial à Ryad que l’hydrogène vert était à «un stade embryonnaire», et que la priorité devait être donnée aux biocarburants obtenus à partir de la biomasse pour réduire les émissions.
Souvent présentée comme le Graal de la décarbonation, la filière de l’hydrogène bas carbone (produit à partir d’électricité d’origine renouvelable ou nucléaire) peine à décoller en raison d’une demande très incertaine et du faible déploiement des électrolyseurs, ces machines qui extraient l’hydrogène de l’eau grâce à un courant électrique, une technologie encore très coûteuse. «Reconnaissons que nous n’en sommes qu’au stade embryonnaire et cessons de parler de 10, 20 millions de tonnes», a déclaré le PDG de TotalEnergies en référence aux objectifs très ambitieux de l’Union Européenne pour la production annuelle. «Cela n’a aucun sens. Soyons sérieux et trouvons la bonne feuille de route», a-t-il commenté.
La Commission européenne a indiqué vouloir produire 20 millions de tonnes d’hydrogène bas carbone par an dès 2030. Or une étude du Commissariat à l’énergie atomique français a révélé le mois dernier que la demande industrielle en hydrogène bas carbone s’élèverait à seulement 2,5 millions de tonnes par an d’ici à 2030 et 9 millions de tonnes en 2040. Dans le monde, le plus important électrolyseur a été mis en service par la Chine en juillet 2023, pour une capacité de 260 MW et une production attendue de 20.000 tonnes d’hydrogène bas carbone par an. «Un seul, pas dix, un seul», a observé Patrick Pouyanné, qui juge la technologie des électrolyseurs «assez immature, en fait».
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«Pour être clair, il n’y a aucun moyen de réduire le coût de l’hydrogène vert s’il ne s’agit que d’un marché de niche», pour les raffineries par exemple, a souligné le PDG. «Si nous n’avons pas de marché (…) pour les transports, il sera très difficile de faire baisser les coûts», selon lui. Pour le patron de la major française, «la meilleure façon de produire des molécules vertes est aujourd’hui le biocarburant», issu de la biomasse (matières premières d’origine végétale, animale ou issues de déchets). Quant au carburant d’aviation durable (SAF), il estime là aussi que «le meilleur moyen» est de le produire à partir de biomasse, «pas de sauter sur l’hydrogène vert» pour faire des carburants de synthèse (e-carburants). «Donnons la priorité aux biocarburants, il y a beaucoup à faire et ça marché», a-t-il plaidé.