C’est la question logée dans un coin de la tête de chaque supporter de l’équipe de France, de chaque joueur concerné aussi, et surtout de Didier Deschamps : comment vont les Français des gros clubs européens ? À un peu plus d’un mois de l’Euro 2024 (14 juin – 14 juillet), la question peut nourrir de lourdes inquiétudes ou de grands espoirs. Sept Tricolores, dont deux blessés, seront au cœur de la demi-finale aller de Ligue des champions opposant le Bayern Munich au Real Madrid ce mardi (21h00). On fait le point sur des états de forme qui diffèrent.

Au Real Madrid, ils sont trois, et Carlo Ancelotti les adore. Ferland Mendy semblait sur la pente descendante l’an dernier, après avoir loupé trois mois cruciaux sur blessure (février à avril) et alors que son contrat s’achevait en juin 2025. Fran Garcia, international espagnol de 24 ans formé au club, était censé le concurrencer. Finalement, il n’y a pas photo. Mendy, 28 ans, a rangé son irrégularité chronique au placard.

Une irrégularité d’abord physique. Les pépins l’ont privé de nombreuses sélections chez les Bleus, au point que, même apte, il n’avait pas été du voyage au Qatar pour la Coupe du monde 2022. Une phase difficile largement derrière lui, ce qui en fait «le meilleur latéral gauche du monde défensivement» selon Carlo Ancelotti. «Il est complet et très fort dans les un-contre-un, mais aussi dans les deux-contre-un qui se présentent souvent à lui, parce qu’il a Vinicius devant», étayait le coach madrilène en février dernier.

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«Je vais le redire, Mendy est le meilleur au monde à son poste», a insisté Ancelotti après les quarts de finale de Ligue des champions face à Manchester City, dont l’ancien Lyonnais n’a pas raté une minute. Pas plus qu’Eduardo Camavinga, un peu moins régulier, mais ébouriffiant en quart aller face à City (3-3). Récupérateur, relanceur, technique et volume physique : Camavinga a tout, personne n’en doute.

Le milieu tout-terrain, qui dépanne encore parfois en latéral gauche comme face à Barcelone le 21 avril (victoire 3-2), est proche de franchir cet ultime cap qui l’installerait parmi les tauliers à son poste. Sa grande expérience (137 matches au Real, 240 en professionnels) ferait presque oublier son âge, 21 ans. Soit trois de moins qu’un autre homme-clé des Merengue, Aurélien Tchouameni. Lui aussi a comblé les trous, plutôt en défense centrale.

«On dirait qu’il y a toujours joué. C’est un joueur très intelligent», a salué Ancelotti en février. «Je lui ai dit qu’il a joué là parce que c’était une situation d’urgence. Maintenant, je dois trouver une autre excuse pour le faire jouer à ce poste…», a plaisanté l’Italien. Voué à un rôle de sentinelle, à combler les brèches et entretenir la sérénité des siens, il s’est mué en buteur d’une frappe canon pour délivrer le Real à Majorque, le 13 avril (0-1). Un but après lequel un jeune supporter majorquin a mimé des gestes de singe à l’encontre du Français. Pas assez pour le perturber. Sur le terrain ou en dehors, Tchouameni est au-dessus de la mêlée.

Au Bayern Munich, véritable bastion français depuis des années, on n’a jamais été autant déçu par ce qu’apporte l’Hexagone. Recruté cet hiver à Galatasaray pour 30 M€, Sacha Boey a joué deux matches avant de se blesser. Une déchirure musculaire à la cuisse gauche dont le latéral droit (23 ans) ne s’est toujours pas remis. Il a rejoint à l’infirmerie Kingsley Coman, dont la saison est à oublier.

Le champion du monde 2022 s’est déchiré un ligament du genou gauche fin janvier. Puis à son retour en avril, c’est l’adducteur droit qui a lâché. Le voilà incertain pour l’Euro, une compétition que Dayot Upamecano va disputer. Mais dans quel état ? Le défenseur des Bleus a reçu deux cartons rouges d’affilée, contre la Lazio Rome en 8e de finale aller de C1 le 14 février (défaite 1-0) et contre Bochum en Bundesliga le 18 février (défaite 3-2).

«Il peut avoir des passages à vide mais c’est un grand professionnel, un grand joueur. Il a une grande personnalité», a rassuré en mars Julian Nagelsmann, sélectionneur de l’Allemagne qui a eu Upamecano sous ses ordres à Leipzig puis au Bayern. La fébrilité du natif d’Évreux a conduit Thomas Tuchel à se passer de lui lors des deux matches contre Arsenal en quarts (2-2, 1-0). «En ce moment, il commet trop de grosses erreurs individuelles qui décident des matches», a reconnu Tuchel, avant de nuancer : «J’espère qu’il sait et sent que nous le soutenons pleinement. Ce n’est pas le moment de remuer le couteau dans la plaie.»

Les seuls instants cocorico au Bayern, en ce moment, sont à mettre au crédit du benjamin : Mathys Tel, 19 ans depuis samedi dernier. Pour sa deuxième saison en Bavière, l’ancien Rennais a logiquement progressé : 28 matches dont 2 titularisations et 6 buts en 2022-23, et déjà 38 matches dont 7 titularisations, 9 buts et 5 passes décisives en 2023-24. Et ce malgré la venue d’un des meilleurs attaquants du monde, Harry Kane, l’été dernier.

Candidat aux JO de Paris avec les Bleuets, Tel a connu une période plus délicate pendant l’hiver. «Processus tout à fait normal», a balayé Tuchel, satisfait de «cette insouciance et cette envie de faire quelque chose, même en dix minutes». Un rôle de «supersub» dont le Bayern pourrait avoir besoin face au Real.