Les inondations provoquées par la tempête Daniel dans l’est de la Libye ont dévasté une grande partie de la ville de Derna, coûté la vie à des milliers de personnes et fait un nombre incalculable de disparus.
Le 10 septembre, la tempête Daniel a atteint la côte orientale de la Libye, touchant la métropole de Benghazi avant de se diriger vers l’est en direction de plusieurs villes comme Al-Bayda, mais surtout Derna, qui comptait 100.000 habitants avant le drame.
Dans la nuit du 10 au 11 septembre, les deux barrages sur Wadi Derna, qui retiennent les eaux de l’oued qui traverse la ville, ont lâché. Des torrents puissants ont détruit les ponts et emporté des quartiers entiers avec leurs habitants de part et d’autre de l’oued, avant de se déverser dans la Méditerranée.
Le bilan meurtrier continue de s’alourdir. Au moins 11.300 personnes sont mortes et 10.100 restent portées disparues dans la seule ville de Derna, dans l’est du pays, ravagée il y a près d’une semaine par des inondations sans précédent, selon un bilan publié dans la nuit de samedi à dimanche par un organisme de l’ONU, citant le Croissant rouge libyen. Le Croissant-Rouge libyen a toutefois démenti ce bilan.
Les inondations ont par ailleurs fait au moins 170 morts dans d’autres endroits de l’est de la Libye, a-t-il ajouté. «Ces chiffres devraient augmenter alors que les équipes de recherche et de sauvetage travaillent sans relâche», a averti l’OCHA.
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Les infrastructures vétustes, les constructions en violation des règles urbanistiques au cours de la dernière décennie et le manque de préparation face à ce type de catastrophe ont transformé Derna en un cimetière à ciel ouvert, selon des experts. La plupart des morts «auraient pu être évités», a estimé jeudi Petteri Taalas, patron de l’Organisation météorologique mondiale qui dépend de l’ONU. Les années de conflit en Libye ont «en grande partie détruit le réseau d’observation météorologique», tout comme les systèmes informatiques, a-t-il déclaré.
Les deux barrages à l’origine de la catastrophe présentaient des fissures depuis 1998, a indiqué samedi le procureur général libyen, Al-Seddik al-Sour, qui a ouvert une enquête. Des travaux avaient été entamés en 2010 par une société turque après des années de retard, mais suspendus quelques mois plus tard dans la foulée de la révolution libyenne de 2011, et ils n’ont jamais repris depuis, selon le procureur.
La Libye est en effet plongée dans le chaos depuis la mort du dictateur Mouammar Kadhafi en 2011, avec deux gouvernements rivaux, l’un reconnu par l’ONU basé dans la capitale Tripoli, à l’ouest, l’autre dans la région orientale touchée par les inondations.
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L’aide internationale promise dès le début de la catastrophe arrive et s’organise. Deux avions chargés d’aide, l’un en provenance des Émirats arabes unis, l’autre d’Iran, ont atterri à Benghazi, a constaté une journaliste de l’AFP. L’OMS a annoncé que 29 tonnes de matériel médical étaient arrivées à Benghazi, à environ 300 kilomètres de Derna.
La Finlande, l’Allemagne et la Roumanie ont envoyé de l’aide. L’Égypte voisine, la Jordanie et le Koweït ont également envoyé des avions transportant de l’aide. L’Algérie, la France, l’Italie, le Qatar, la Tunisie et les États-Unis ont également proposé leur aide. Les Nations unies ont lancé un appel de fonds de plus de 71 millions de dollars pour venir en aide aux centaines de milliers de personnes dans le besoin.
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Les énormes inondations en Libye font suite à un «medicane», phénomène météorologique rare mais destructeur dont les scientifiques pensent qu’il va s’intensifier dans un monde en réchauffement. Ce terme peu connu du grand public mais régulièrement utilisé par les scientifiques et les météorologues est un mot-valise formé des mots «Méditerranée» et «ouragan» («hurricane» en anglais).
Outre leurs vents violents, les «medicanes» sont également accompagnés de pluies torrentielles. La tempête Daniel a déversé jusqu’à 170 millimètres d’eau en moins de deux jours sur la Cyrénaïque, dans le nord-est de la Libye, où la pluie est très rare en cette saison. Les eaux de surface de la Méditerranée orientale et de l’Atlantique sont de deux à trois degrés Celsius plus élevées que d’habitude début septembre, ce qui aurait donné un coup de fouet à la tempête Daniel, selon des scientifiques.