À Rennes, Souleymane Barry, 20 ans, est employé dans une boulangerie depuis trois ans. Ce Guinéen, arrivé en France en 2019 alors qu’il était mineur, est menacé d’expulsion malgré «trois ans d’une intégration parfaite, un talent fou», assure son patron. La faute à un «imbroglio administratif», selon Olivier Cothenet. Le jeune homme, qui a été «protégé par l’État en tant que mineur non accompagné», se serait fait voler ses empreintes digitales lors de son passage à Dakar. «Du jour au lendemain, il est un fantôme sur le territoire français, sans aucun droit, sans aucune protection», dénonce Margaux Cothenet.

Pour sensibiliser l’opinion et les pouvoirs publics, ces boulangers ont lancé une pétition qui, à ce jour, a recueilli plus de 28.000 signatures. L’Objectif ? Obtenir de la préfecture un titre de séjour en faveur de leur employé décrit comme un «salarié exemplaire». «Il parle français, va à l’école, s’épanouit et se sent partie intégrante d’une société qu’il aime», souligne Margaux Cothenet. Des qualités qui ont convaincu ses patrons de faire signer à Souleymane un CDI.

Cette histoire n’est pas sans rappeler celle d’un autre apprenti boulanger guinéen dont le patron, à Besançon, réclamait aussi sa régularisation, en 2021. Son patron s’était même mis en grève de la faim pendant une dizaine de jours et des personnalités du monde politique, syndical, artistique ou littéraire avaient interpellé Emmanuel Macron pour inciter les pouvoirs publics d’accorder un titre de séjour au jeune homme de 18 ans à l’époque. Ce qui fut chose faite : l’apprenti boulanger guinéen de Besançon a été régularisé. Une issue heureuse qui pourrait donner de l’espoir à Souleymane et ses patrons.

Derrière cette histoire, se cache un enjeu majeur : la régularisation des travailleurs sans-papiers dans les métiers dits «en tension» (pour lesquels les employeurs peinent à recruter). Sans doute la mesure la plus sensible du projet de loi immigration examiné au Sénat à partir du 6 novembre et à l’Assemblée début 2024. Une mesure à laquelle Les Républicains sont farouchement opposés, comme l’a rappelé son président Éric Ciotti. «Nous n’accepterons jamais sous quelque forme que ce soit l’extension des principes de régularisation des clandestins», insiste le député des Alpes-Maritimes.