Thibaut Pinot avait du mal à réaliser vendredi qu’il allait arrêter sa carrière le lendemain au Tour de Lombardie, point final d’une carrière atypique dans le milieu du cyclisme qu’il semble surtout soulagé de quitter, même s’il aurait préféré le faire dans une meilleure forme.

Après avoir accumulé les pépins de santé depuis le Tour de France, le grimpeur français de 33 ans espère avant tout finir la course pour ne pas décevoir ses supporters qui seront nombreux à venir l’acclamer une dernière fois sur le bord de la route.

«Il fallait que ça se termine», a expliqué le coureur de Groupama-FDJ, qui «n’aime pas être au centre de l’attention», lors d’un point-presse à son hôtel d’Albavilla, dans les environs de Côme où il prendra son dernier départ samedi.

À lire aussiCyclisme : Thibaut Pinot, l’ami public numéro 1

«Je suis un peu stressé. C’est quand même un événement particulier. Je suis pressé que la course commence pour lâcher tout ça. Je reçois beaucoup de messages sympas et gentils. Mais pour l’instant j’essaie de me concentrer sur la course. Je vais prendre le temps de répondre à tout le monde à partir de dimanche, en prenant le temps de faire les choses bien. Beaucoup de monde sera là pour moi et forcément ça rajoute de la pression, surtout quand tu sais que tu risques de ne pas être à la hauteur. Je n’aime pas décevoir les gens.»

À lire aussiCyclisme: Thibaut Pinot, la dernière poussée de fièvre d’un perdant magnifique

«Dire que ça irait, ce serait mentir. J’aurais préféré finir en pleine santé au Lombardie. J’espérais que mon physique et ma fragilité me laissent tranquille. Mais depuis le Tour de France, j’ai connu une accumulation de pépins de santé qui ont fait que c’est devenu vraiment compliqué. J’ai chopé des trucs… ce que j’ai eu au bide (parasite intestinal, NDLR), je ne l’avais encore jamais eu de ma carrière et il fallait que ça me tombe dessus à trois semaines de la fin. Je sens quand même que je progresse, mais il me manquera une dizaine de jours pour être bien. Après, j’ai tellement l’habitude de me battre contre tout ça que je me suis fait une raison.»

«Peur ne pas terminer ? Oui j’y pense, surtout que les courses italiennes ne pardonnent pas. Sur les cinq Monuments, le Lombardie est la course la plus dure à finir. Si tu lâches à la sortie de San Pellegrino, il reste 90 bornes, tu sais que c’est mort. Sur un jour sans, il y a cette crainte. J’essaie de ne pas trop y penser. Je suis quand même dans l’optique de finir ma carrière correctement. J’attends demain pour savoir comment je me lève. Pour l’instant je n’ai pas la réponse.»

«Lundi, je rentre à la maison et la première chose que je ferai c’est aller faire le tour de mes animaux. Ça fait dix jours que je suis parti, mais dans ma tête, j’ai l’impression que ça fait un mois. Je sentais que ça allait être la semaine plus longue de ma vie et ça l’est. Je n’aime pas être au centre de l’attention et aujourd’hui j’y suis et demain je le serai aussi. Plus les années passent, moins je me sens à l’aise avec tout ça. Il fallait que ça se termine.»

«Je ne réalise pas vraiment que ça s’arrête samedi. Je pense que ce sera plus le cas après la coupure, lorsqu’il y aura la pluie et le brouillard et que je n’aurai plus besoin d’aller mettre le cuissard. Si je m’enferme dans ma ferme, on va vite oublier. Je n’ai pas envie d’oublier les gens que j’ai côtoyés pendant quinze ans, donc j’irai les voir dès que je pourrai. J’espère qu’on retiendra de moi le coureur que j’étais, tout simplement, avec mes défauts et mes qualités, les victoires et les défaites. La vie continue et les gens passent vite à autre chose aussi. Dans tous les cas, ça ne peut pas être pire qu’aujourd’hui.»