La Réserve fédérale américaine (Fed) a maintenu mercredi ses taux d’intérêt inchangés à l’issue de sa dernière réunion, faisant état de l’«absence de progrès» récents sur le front de l’inflation, mais a annoncé qu’elle dégonflera moins vite le volume d’actifs à son bilan à partir de juin.
La banque centrale américaine a laissé ses taux au plus haut depuis plus de vingt ans, entre 5,25 et 5,50%, fourchette au sein de laquelle ils évoluent depuis juillet, a-t-elle annoncé dans un communiqué publié à l’issue de sa réunion. Cela a pour effet de maintenir à un niveau élevé les taux d’intérêt des prêts immobiliers, des cartes de crédit, des prêts automobiles… afin d’empêcher les prix de continuer à flamber.
Le Comité de politique monétaire (FOMC) précise que «ces derniers mois, il y a eu une absence de progrès supplémentaires vers l’objectif du Comité de 2% d’inflation». L’inflation semblait sur la bonne trajectoire pour rejoindre progressivement son objectif de 2%. Mais depuis janvier, elle est repartie à la hausse, à 2,7% sur un an en mars, selon l’indice PCE privilégié par la Fed – celui qu’elle souhaite ramener à 2% -, et à 3,5% selon l’indice CPI.
La Fed maintient «sa position, comme si elle faisait une pose de yoga. Ils doivent maintenir les taux, au moins au niveau actuel», sous peine de faire face à «une reprise de l’inflation», a commenté mercredi lors d’une conférence téléphonique (avant la décision) Nela Richardson, cheffe économiste d’ADP, qui publie une enquête mensuelle sur l’emploi privé.
Le président de la Réserve fédérale américaine, Jerome Powell, a prévenu mercredi qu’il faudrait sans doute «plus de temps que prévu» avant d’avoir confiance dans la baisse de l’inflation, impliquant que les taux resteront élevés plus longtemps. Lors d’une conférence de presse, il a toutefois noté qu’il était «peu probable que le prochain mouvement sur les taux soit une hausse», la politique monétaire étant jugée «suffisamment restrictive» sur la durée. À ces annonces, la Bourse de New York, qui stagnait mercredi, a soudainement grimpé avant de clôturer divisée. L’indice Dow Jones a grappillé 0,23%, le Nasdaq, à forte coloration technologique, a perdu 0,33% et l’indice élargi S
Les marchés, qui étaient pleins d’espoir de voir les taux commencer à baisser en juin, misent désormais plutôt sur septembre, ou même novembre, selon l’estimation de CME Group. «La Fed aura besoin de plusieurs mois de bonnes nouvelles en matière de croissance des salaires et d’inflation», note Nancy Vanden Houten, économiste pour Oxford Economics.
La Réserve fédérale marque cependant un début d’assouplissement de politique monétaire: elle a en effet annoncé mercredi qu’elle réduira moins vite à partir de juin, le volume d’actifs à son bilan.
Le portefeuille de la Fed avait grossi pendant la pandémie, lorsqu’elle avait massivement acheté des titres, inondant le marché de liquidités pour maintenir le fonctionnement du système financier. Puis, parallèlement aux hausses de taux destinées à lutter contre l’inflation, elle avait cédé des titres, réduisant son portefeuille de 1.500 milliards de dollars.
Le rebond de l’inflation aux États-Unis contraste avec l’Europe, où le net ralentissement de l’inflation conduit la Banque centrale européenne (BCE) à envisager une baisse des taux dès juin.
Le marché de l’emploi américain aussi reste trop tendu au goût de la Fed. Les chiffres officiels d’avril seront publiés vendredi, mais les entreprises du seul secteur privé ont créé 192.000 emplois en avril, selon l’enquête mensuelle ADP/Stanford Lab publiée mercredi. Pour enfoncer le clou, l’indice du coût de l’emploi s’est montré au premier trimestre bien plus élevé qu’attendu, «suggérant que la décélération des salaires s’est arrêtée, au moins temporairement», relève Krishna Guha, économiste pour Evercore, société de conseil en investissements.