Le foie gras sera bel et bien présent sur les tables des fêtes de fin d’année. Sa production a progressé de 20% en France en 2023, après une année 2022 catastrophique marquée par des abattages massifs de canards liés à la grippe aviaire, a annoncé jeudi l’interprofession du foie gras Cifog, qui compte sur la vaccination pour «tourner la page». «Le foie gras reprend des couleurs, c’est un soulagement» après un épisode d’influenza aviaire ininterrompu de trois ans, a déclaré Marie-Pierre Pé, directrice du Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras (Cifog), lors d’une conférence de presse à Paris.

La production de foie gras de canards devrait atteindre plus de 9800 tonnes en 2023, soit une augmentation de 20% par rapport à 2022, année de «recul historique». «Sur les dix dernières années, la production de foie gras a payé un lourd tribut à l’influenza aviaire en perdant 50% de ses volumes (18.600 tonnes en 2013)», selon le Cifog.

Après une augmentation des prix de plus de 15% l’an dernier au moment des fêtes de fin d’année, la profession estime que la hausse sera cette année «d’environ 5%» dans les rayons des supermarchés. Bien qu’en augmentation, les volumes restent réduits : «L’offre sera à peu près équivalente à celle de l’an dernier en magasin, du fait de la faiblesse des stocks», a précisé Marie-Pierre Pé.

Après une crise inédite (32 millions de volailles abattues depuis l’été 2021), le gouvernement a décidé de rendre obligatoire la vaccination dans les élevages de plus de 250 canards, hors reproducteurs, pour tenter d’enrayer sa propagation. «À ce jour, on estime que 10% des 64 millions de canards concernés ont été vaccinés», a précisé Marie-Pierre Pé. Le coût de cette campagne de vaccination est estimé à 100 millions d’euros, dont 85% pris en charge l’État, le reste étant assumé par les professionnels.

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Cette initiative, dont les éleveurs espèrent qu’elle mettra fin aux massifs abattages préventifs, est unique au monde, la France étant le seul pays à s’être engagé dans cette démarche en dépit des freins à l’exportation qu’elle implique. La vaccination est un motif de défiance pour certains pays qui redoutent que le virus circule à bas bruit dans les élevages. Le Japon, qui fut le premier marché à l’export du foie gras français hors de l’Union européenne, a ainsi suspendu toutes ses importations.

«Le chiffre d’affaires de la filière lors d’une année sans influenza se situe entre 1 et 1,5 milliard d’euros. L’export représente de 10 à 15% des volumes et 100 à 120 millions d’euros en valeur. En 2022, le chiffre export est tombé à 80 millions d’euros», a détaillé Victor Guyon, responsable export du Cifog. «Il nous fallait réagir pour sauver la filière. En 2022, 80% des (canards) reproducteurs de la filière ont disparu», a expliqué Éric Dumas, président du Cifog et lui-même éleveur de canards gras dans les Landes.

«Notre trésor de guerre est en partie génétique», a-t-il insisté, expliquant que la filière avait réagi en délocalisant une partie de la production, notamment pour «déconcentrer» les élevages et n’augmenter que très progressivement le retour des canards dans les élevages, après une longue période de «vide sanitaire». Après avoir lourdement touché le Sud-Ouest en 2021, le virus s’est propagé en 2022 pour la première fois aux Pays de la Loire, dans un bassin qui concentre 100% des canards reproducteurs et «plus de 70% des canetons destinés à la filière foie gras en France», selon le Cifog. La France a récupéré son «statut indemne» de grippe aviaire le 14 août 2023.